Les implants de billes d’or : une technique pas si nouvelle
Peut-être avez-vous déjà entendu parler de l’utilisation de l’or dans le traitement des douleurs liées à la dysplasie des hanches chez le chien, sans en connaître forcément les détails.
Cette technique n’est pas récente. En effet l’implantation de microbilles d’or sur des points d’acupuncture pour traiter les animaux a été lancée en 1972 aux États-Unis par le Docteur Grady Young. D’autres praticiens américains, puis européens ont poursuivi le développement de la technique et en ont étendu les indications. En 2020, des vétérinaires la pratiquent quasiment partout dans le monde, avec des modalités variées. Je vais en présenter dans cet article les grands principes, en me limitant, pour la mise en oeuvre, aux protocoles que je pratique depuis la fin des années 80.
De quoi s’agit-il ?
Magrains est le nom déposé d’implants que j’utilise majoritairement, contraction de Magnetic Grains. Ce sont des implants japonais que les précurseurs américains employaient. Leur action est ionisante, et la précision dans le lieu d’implantation est essentielle. L’alliage comporte du fer, du cobalt, du manganèse,… Les Magrains Argent ont un enrobage d’argent et de zinc, les Magrains Or un enrobage d’or et de cuivre). Depuis quelques années je leur associe l’usage d’implants d’or massif (utilisés en Autriche et en Slovénie), de un millimètre de diamètre et trois millimètres de long, avec des extrémités arrondies. Il me semble à ce stade des essais que ce complément apporte un léger plus dans quelques cas particuliers, cependant le coût important et croissant de ces implants parait peser plus lourd que le gain d’efficacité.
L’implantation de Magrains, si elle utilise les points d’acupuncture, n’est pas à proprement parler une technique de médecine chinoise. En effet elle ne vise pas à rééquilibrer la circulation énergétique à un moment donné par l’implantation provisoire d’aiguilles.
Ici on implante définitivement les billes dans des points profonds, presque toujours péri-articulaires (notez que le mot chinois qui désigne le point d’acupuncture veut dire « caverne », donc le point n’est pas que le repère superficiel où l’on insère l’aiguille). Certains praticiens préfèrent employer des billes d’or massif, ou des morceaux de fil d’or. Je n’ai pas connaissance d’études comparatives.
En pratique
Après un examen général du chien et l’interrogatoire sur son histoire , je traite les blocages ostéopathiques et pratique une séance d’acupuncture « classique ». C’est là aussi que sont examinées les radios, que l’on complète si nécessaire. Le nombre de lieux à implanter est alors déterminé. C’est une étape très importante, en effet il n’y a pas de « recette » qui donnerait une carte des points à implanter pour chaque articulation. Je sais que cette méthode est enseignée, mais ce n’est pas mon choix .
L’intervention se fait au rendez-vous suivant. L’anesthésie générale dure entre une heure et deux heures et demie. Les lieux d’implantation sont tondus et désinfectés, il n’y a pas de sutures. Sous réserve que le diagnostic articulaire soit assez précis, l’intervention est faite une fois pour toutes.
Les réponse à vos questions :
Quelles sont les suites ?
L’amélioration est parfois extrêmement rapide (nous avons vu des chiens qu’il fallait porter dans le coffre de la voiture y sauter seuls le jour même, d’autres qui se déplaçaient avec difficulté voler des aliments sur une table haute dès le lendemain), parfois il faut quelques mois avant d’observer une diminution des symptomes douloureux. De façon générale les douleurs des membres antérieurs sont les plus lentes à rétrocéder. Par exemple pour une OCD opérée sans résultats sur une épaule (Montagne des Pyrénées implanté à 10 mois) où la boiterie allait en s’aggravant, il a fallu en tout 5 mois pour qu’elle cesse complètement. Le coude est également une articulation plus complexe, avec souvent même une aggravation momentanée avant l’amélioration .
Ce qui est régulièrement observé, c’est que plus le chien est actif, et plus l’implantation de Magrains donnera des résultats. Ce n’est donc pas une technique palliative nécessitant de la prudence, au contraire l’exercice est recommandé .
Une chienne d’agility souffrant de problèmes articulaires chroniques avait été implantée pour profiter d’une retraite sans douleurs. Elle a en fait pu reprendre la compétition et même le haut niveau. Lors d’un examen ostéopathique quatre ans après l’intervention, j’ai observé avec étonnement que sur l’épaule non implantée la capsule était logiquement fibrosée par rapport à l’âge de la chienne, alors que l’autre épaule, qui avant posait tant de problèmes depuis des années, avait une amplitude de mouvement bien supérieure.
Les échecs sont très rares, ils sont je pense surtout liés à des erreurs d’application de la technique. Par exemple, au début, j’en ai rencontré en minimisant le nombre d’articulations à traiter. Maintenant je prends en compte l’articulation qui motive la première consultation, mais aussi celles qui ont adapté puis compensé la pathologie de départ . Donc si un chien ne va pas mieux, je cherche où je me suis trompée d’abord dans le diagnostic puis dans le choix des lieux d’implantation.
Une séance d’ostéopathie est utile et informative deux à trois mois après l’intervention.
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Sait-on comment ça marche ?
Le mode d’action de la pose de magrains est certainement multifactoriel.
D’après ce que l’on observe cliniquement, on peut inférer au moins quatre types d’action : antalgique, anti-inflammatoire, proprioceptive et trophique.
• Antalgique, car assez rapidement le comportement du chien est souvent plus confiant, plus aventureux, moins anxieux. Cet effet se rapproche de l’effet d’une séance d’acupuncture avec des aiguilles (effet au niveau local avec libération de neurotransmetteurs et d’inhibiteurs de l’inflammation qui réduisent la douleur). Implanter autour d’une articulation sans choisir les points d’acupuncture est moins efficace.
• Anti-inflammatoire : « effet acupuncture » également, avec un effet supplémentaire lié à la diffusion de sels d’or dans les tissus (à rapprocher des effets de la chrysothérapie) par interaction avec certaines cellules inflammatoires. (*) De plus, les implants émettent des charges électriques positives (action antalgique, mais aussi effet de compétition avec le calcium qui est favorable sur l’évolution des ostéophytes).
• L’effet proprioceptif est sans doute le plus original: lorsqu’une articulation souffre d’arthrose, le corps peut choisir la solution de la fuite de la douleur en adoptant une position antalgique. C’est une bonne idée seulement à court terme, puisque se tenir et fonctionner hors des normes biomécaniques finit par accélérer la dégradation du cartilage et la fonte musculaire. Or après la pose des billes d’or , la normalisation des positions précède (et facilite) la récupération musculaire. Donc dans les suites, plus le chien est actif et meilleurs seront les résultats.
• Trophique : c’est une hypothèse, et dans certains cas c’était le seul effet recherché, comme sur une suite d’ostéosynthèse où l’ossification s’était faite par « foyers » hyperdenses au milieu d’une trame osseuse déminéralisée, avec suppression d’appui persistant plusieurs mois après la chirurgie, et donc une fonte musculaire sévère. Après l’échec de différents traitements, la pose des billes d’or a permis la récupération, une radio à deux mois confirmant une homogénéisation du tissu osseux.
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Quelles sont les indications ?
• Dysplasie coxo-fémorale. C’est l’ indication la plus fréquente, et la plus connue . L’information importante à diffuser est qu’on peut intervenir sur des chiots dès les « pré-radios » des hanches à la moitié de la croissance. Le mot dysplasie évoque une déformation et le manque de congruence entre deux éléments osseux, mais chez le chiot c’est bien le manque de maintien de la hanche par les tissus mous qui caractérise les premiers stades. Le diagnostic précoce est donc primordial et l’indication de la pose de billes d’or est majeure à ce stade. On peut tonifier les structures péri-articulaires et influencer l’évolution de la croissance osseuse avant même que les processus dégénératifs n’aient commencé.
• Spondylarthrose (lombosacrée, lombaire, dorsale comme chez les bouledogues français, et même cervicale ou cervicodorsale en cas de syndrome de wobbler).
• Syndrome de la queue de cheval
• Certaines incontinences urinaires et fécales
• Dysplasie du coude, OCD de l’épaule, arthrose du grasset …
• Otites chroniques
• Certains vétérinaires utilisent couramment la technique pour traiter les chiens épileptiques .
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CONCLUSION
Les implants de billes d’or sont une solution intéressante pour soulager de nombreuses pathologies articulaires chroniques chez les chiens : intervention unique, peu ou pas de complications, budget peu élévé en comparaison de la chirurgie et même du suivi par acupuncture. Pour la dysplasie des hanches, l’intervention précoce est recommandée : « Alertez les bébés » reste un bon conseil.